Matinées

Mes matinées sont des princesses capricieuses qu'il me faut accueillir avec maintes pirouettes, qu'il faut caresser suavement:

"Dis moi que je t'ai manqué, que chaque nuit renouvèle l'amour sacré que tu me portes."

Ce sont mes plus chastes instants, quand le rêve devient réalité tiède, encore modulable dans sa cire pastel.

Oui. Tout est à faire et, pour un moment, je m'en réjouis avant de me dire qu'il y a beaucoup à faire.

Mes altesses s'impatientent quand le cocher s'endort:

" Comment !? Personne ne danse pour célébrer cette nouvelle rotation astrale? Peut-être sont-ils déjà partis fanfaronner dans les bouquets feuillus qui bordent nos océans cimentés?

Non? C'est curieux, vouloir un jus fait de concentré quand on vous en offre un fraîchement pressé chaque matin. "

Mes matinées dégoulinent, brûlées avant le jour. Elles s'écrasent dans les flasques brunes, larmes des camions, grincement constant d'un orchestre dont les cordes ont perdu leurs repères.

Alors je regarde tous les films de princesse, des dessins animés, les seuls qui me font pleurer d'une tristesse infinie, légère et perdue.